Après la rénovation des bâtiments, le second volet du titre V intitulé "Se loger" du projet de loi Climat et Résilience consacré à la lutte contre l'artificialisation des sols est arrivé en discussion dans l’hémicycle le 14 avril. Sans surprise - au vu des 1.500 amendements déposés -, une passe d’armes s’est engagée en séance autour de la trajectoire de réduction de moitié de l’artificialisation des sols sur la décennie à venir, dont le point d’entrée sont les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), avant une déclinaison concertée à l’échelle locale dans les documents d’urbanisme, ainsi que le prévoit l’article 49.
Une "verticalité" qui attise la rivalité entre les métropoles et la ruralité, et fait craindre au député André Chassaigne (GDR ) une paralysie du développement rural. Une inquiétude qui a fait tache d’huile dans l’hémicycle, et particulièrement dans les rangs LR, Libertés et Territoires et UDI. "Vous laissez le soin à un décret de décliner entre les territoires les dispositions que nous votons ici, mais sans nous donner la clé de cette répartition territoriale", a notamment pointé l'ancienne ministre du Logement, Sylvia Pinel (Libertés et territoires).
"On ne donne aucune consigne pour passer à zéro artificialisation", s’est défendu le rapporteur thématique Lionel Causse (LREM), rappelant la palette d’outils à la disposition des communes à travers les opérations de revitalisation de territoires (ORT) ou le programme Petites villes de demain. Pour la ministre déléguée au logement, Emmanuelle Wargon, c’est au contraire "une chance pour un nouveau développement plus équilibré, pour chacune des échelles de nos territoires, de la grande ruralité à la périphérie, des villes moyennes jusqu’aux métropoles, (…) une autre manière de concevoir l’aménagement du territoire, de concevoir l’urbanisme".
Alors que la France consomme chaque année environ 28.000 hectares, soit l’équivalent de trois fois la surface de la ville de Paris, les deux tiers de l’artificialisation proviennent de l’étalement du logement. "Nous devons réfléchir à la bonne manière d’habiter qui réponde aux aspirations des familles et soit compatible avec nos enjeux écologiques", a souligné la ministre, insistant sur le passage d’une "notion de sobriété foncière, qui était déjà une notion importante mais qui signifiait simplement consommer moins, à une notion d’équilibre global".
Le débat a très vite rebondi sur la question des entrepôts du e-commerce, que de nombreux élus de gauche comme de droite, mais aussi au sein de la majorité, souhaitaient voire inclure dans le dispositif sur les grandes surfaces. "On ne peut pas faire comme si ce sujet n’avait rien à voir avec les zones commerciales. (…) On sait bien aussi qu’on ne pourra contrôler l’essor de cette activité que par le biais de la logistique et de la maîtrise de l’implantation", a ainsi relevé le député Julien Aubert (LR).
Plusieurs regroupements de commerçants, notamment la Confédération des commerçants de France (CDF), la Fédération nationale des centres-villes, les Commerçants et Artisans des métropoles de France (CAMF) et les Vitrines de France, poussaient pour "un assujettissement des entrepôts des 'pure players' à l'autorisation d'exploitation commerciale qui régit les établissements de commerce". L’association de défense de l'environnement, Les Amis de la Terre, avait elle aussi fait part de ses craintes que "l'exclusion des entrepôts du moratoire partiel accélère les implantations d'entrepôts d'e-commerce et les fermetures de magasins".
La ministre a toutefois déplacé sa réponse sur le terrain fiscal faisant valoir qu’à compter du 1er juillet prochain, les plateformes de commerce en ligne deviendront collectrices de TVA pour les biens vendus en France et provenant d’un pays tiers. Tandis que le rapporteur développait les quelques avancées : "l'installation de nouveaux entrepôts sera soumise à une étude d'impact environnemental, une planification territoriale renforcée par les élus locaux et à une obligation de gestion économe des espaces naturels".
Adapter les règles d’urbanisme (chapitre III - articles 47 à 55)
Dispositions de programmation et notion d’artificialisation (articles 47 et 48)
L’Assemblée a adopté, sans aucune modification, l’engagement programmatique inscrit à l’article 47, pour aboutir en 2050 à l’objectif "zéro artificialisation nette" (ZAN) fixé dans le cadre du "plan biodiversité" présenté en 2018. Une ligne de mire associée à un jalon intermédiaire : diviser par deux le rythme d’artificialisation au cours des dix prochaines années par rapport à la consommation d’espace observée à la décennie précédente. Les amendements proposant de contracter dans le temps ces objectifs ou à l’inverse de ramener à un quart ou un cinquième la part de la réduction projetée ont tous été rejetés. De même ceux proposant d’y substituer la notion "moins complète" "de sobriété foncière".
À l’article 48, qui introduit une définition du phénomène d’artificialisation et intègre cet enjeu au sein des objectifs généraux de l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme, un amendement de Jean-Luc Lagleize (Modem) réaffirme qu’il s’agit bien à terme d’un objectif d’absence de toute artificialisation nette et non simplement "de tendre". Dans les leviers d’action pour y parvenir sont ajoutés "la revalorisation des friches" et la "surélévation des bâtiments existants" (au terme d’amendements Modem), ainsi que pour la qualité urbaine une priorisation des formes innovantes et durables d’aménagement et de requalification urbaine (amendements LR). Un amendement de la députée Florence Lasserre (Modem) cible la définition de l’artificialisation sur l’atteinte aux fonctions écologiques du sol, en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que son potentiel agronomique. Un autre complément (apporté par des amendements similaires Agir ensemble et LR) mentionne explicitement que les surfaces de pleine terre - auquel faisait référence l’avant-projet de loi - ne sont pas considérées comme artificialisées.
D’autres amendements sans être adoptés auront eu le mérite de provoquer le débat. C’est le cas de la proposition du Socialiste Dominique Potier de faire des Scot les schémas directeurs de l’usage des sols naturels et agricoles, afin d’assurer la préservation et la valorisation de ces sols comme outils de la résilience face au changement climatique. Sujet sur lequel la ministre et le rapporteur ont dit souhaiter continuer à avancer dans le cadre de la navette parlementaire.
Déclinaison des objectifs dans la planification régionale (article 49)
L’équilibre établi en commission spéciale, notamment pour allonger la temporalité imposée pour la remise à niveau des documents de planification et d’urbanisme (cinq ans pour les Scot/six ans pour les PLU ou PLUI), n’a pas été bousculé en séance malgré la nuée d’amendements (autour de 300 sur ce seul article). Tout au plus un amendement de la députée Valérie Rabault (Socialistes) précise que c’est bien la révision ou la modification du Scot, PLU ou carte communale qui devra être engagée, et non achevée, dans les 2 ans à compter de la promulgation de la loi, si le document régional n’a pas été modifié dans le délai imparti. Quelques assouplissements supplémentaires ont été introduits par des amendements du député Alain Perea (LREM). Le texte permet ainsi à la collectivité d’engager la procédure d’évolution de son document d’urbanisme résultant du bilan du Scot ou PLU, selon la procédure de la modification simplifiée, plus rapide. Il s’agit également de mieux cerner le cas des Scot et PLU vertueux approuvés avant la promulgation de la loi, qui en raison des efforts entrepris pour la réduction de leur consommation foncière, ne se verront pas opposer directement la règle du "50%" en cas de carence du Sraddet à intégrer les objectifs de la loi. Cette dérogation est circonscrite aux seuls documents d’urbanisme adoptés ou révisés depuis moins de dix ans ayant prévu une réduction d’au moins un tiers de leur consommation foncière sur les 10 années suivant leur adoption.
Le texte précise par ailleurs dans le document d’orientation et d’objectifs (DOO) du Scot les modalités concrètes pour l’application des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols intégrés à son projet d’aménagement stratégique (PAS), sur le modèle de celles prévues par le Sraddet. L'amendement de Valérie Petit (Agir ensemble) intègre ainsi des spécificités territoriales, notamment économiques et démographiques entre les différentes polarités, urbaines et rurales, du territoire, la réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers déjà réalisée, ainsi que le potentiel foncier mobilisable dans les espaces déjà urbanisés. L’amendement conduit également à transférer la réalisation d’une étude de densification des zones déjà urbanisées pour l’ouverture à l’urbanisation à l’alinéa 22 qui s’applique directement aux PLU.
Un autre amendement de Valérie Petit - sous-amendé par le rapporteur - rappelle que, dans la carte communale, comme le texte le prévoit déjà dans le PLU, l'ouverture à l'urbanisation tient compte de la capacité à mobiliser effectivement les locaux vacants, les friches et les espaces déjà urbanisés existants.
Le cas des grands projets d’envergure régionale ou nationale engendrant une artificialisation des sols est par ailleurs pris en compte par un amendement du rapporteur sous-amendé par Alain Perea (LREM). En clair, les projets structurants seront décomptés avant de territorialiser le reste de l’enveloppe, c’est-à-dire sans qu’ils puissent ensuite peser sur "l’enveloppe d’artificialisation" d’un Scot ou d’un PLUi. Compte tenu des préoccupations qui se sont fait jour en séance sur le devenir des territoires ruraux appuyées par les propositions du député André Chassaigne (GRD), le gouvernement a concédé un garde-fou pour tenir compte dans la déclinaison territoriale des objectifs des enjeux spécifiques des communes classées en zone de revitalisation rurale (ZRR). "C’est une mauvaise solution à un bon diagnostic" a toutefois regretté Alain Perea : "les ZRR vont devenir d’importantes poches de respiration en termes de foncier, (…) elles vont aspirer des personnes qui ne sont pas issues de ces territoires mais qui ont les moyens d’acheter de grandes maisons sur de grandes parcelles, ainsi que celles qui, ne trouvant pas de foncier ni de logement à un prix abordable, reculeront, par cercles concentriques, de la grande ville à la ZRR".
Plusieurs amendements similaires (Agir Ensemble, GDR, LR) ajoutent la fiscalité du logement et de la construction parmi les sujets devant être traités dans le rapport que doit remettre le gouvernement dans les six mois suivant la loi pour réformer entre autres la fiscalité de l’urbanisme. À l’initiative de Valérie Petit y figurera également une analyse des différents dispositifs de compensation - agricoles, forestiers, environnementaux - mis en oeuvre dans les plans, programmes et projets pour atteindre l’objectif de "zéro artificialisation nette".
Faculté d’auto-saisine des CDPENAF (article 49 bis A nouveau)
Six amendements identiques (LR, Libertés et territoires, socialistes, UDI, LREM) restaurent la faculté des commissions départementales des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) de s’auto-saisir sur les PLU dans le périmètre d’un Scot approuvé, restreinte en 2014 par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Identification de zones préférentielles pour la renaturation (article 49 bis B nouveau)
Un amendement de Valérie Petit - identique à celui de Alain Perea - incite le document d’orientation et d’objectifs (DOO) du Scot à identifier des zones préférentielles pour la renaturation de sols artificialisés dans le cadre des modalités de protection des espaces nécessaires au maintien de la biodiversité et à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques et de la ressource en eau. À quoi sert cette identification ? À faciliter et à flécher la compensation, afin de développer un maximum de projets de renaturation sur les territoires, précisent-ils.
Actions de mise en valeur des continuités écologiques (article 49 bis D nouveau)
Dans un nouvel article, il est par ailleurs proposé que l’OAP relative à la mise en valeur des continuités écologiques - autrement appelées "trame verte et bleue" - soit désormais rendue obligatoire dans les futurs PLU(i). Cette OAP obligatoire viendra compléter le dispositif permettant déjà au règlement du PLU de localiser dans les zones urbaines les espaces à protéger notamment pour la préservation ou la remise en état des continuités écologiques (L. 151-23 du code de l'urbanisme).
Échéancier prévisionnel d’ouverture à l’urbanisation (article 49 bis C nouveau)
Pour ce qui concerne le PLU, le texte renforce les conditions d’ouverture à l’urbanisation en organisant un phasage au moyen des orientations d’aménagement et de programmation (OAP). La mise en place d’un échéancier prévisionnel d’ouverture à l’urbanisation des zones à urbaniser, permettra, selon le rapporteur, "d’inciter à avoir une réflexion prospective sur les projets et les équipements dès l’amont". L’introduire dans les OAP procure en outre une certaine souplesse, dans la mesure où celles-ci pourront être ajustées lors d’une modification du PLU. L’approche prospective devrait dans certains cas, éviter aux collectivités d’avoir à gérer des effets d’aubaine difficiles à contrôler sur des réserves foncières, tant que des possibilités existent dans les zones déjà urbanisées ou à urbaniser de court terme. La durée au terme de laquelle l’ouverture à l’urbanisation d’une zone à urbaniser (2AU) nécessite une révision du PLU est réduite à six ans (au lieu de neuf actuellement). Il s’agit d’accélérer l’ouverture à l’urbanisation dans les secteurs considérés. Cette mesure est introduite en parallèle de celle visant à ramener à six ans le délai au bout duquel la collectivité procède à une analyse des résultats ou bilan de l’application du PLU, comme celui du Scot ou du PLH (programme local de l’habitat), de sorte que le délai corresponde à la durée du mandat des élus locaux (article 49 bis G nouveau).
Protéger les franges urbaines et rurales (article 49 bis E nouveau)
Le rapporteur propose également d’élargir les possibilités offertes pour les OAP de définir les actions et opérations nécessaires pour protéger les franges urbaines et rurales, c’est-à-dire les zones de contact entre l’espace urbain bâti et l’espace naturel et agricole qui l’environne. Elles peuvent notamment "définir les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement se trouvant en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces nouvellement urbanisés", complète un sous-amendement de Alain Perea. Ce nouvel outil, demandé par la profession agricole, "permettra notamment d'anticiper les conflits d'usage et de voisinage dans le cadre des obligations résultant des zones de non-traitement", explique-t-il.
Part minimale de surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables (article 49 bis F nouveau)
Ce nouvel article, qui résulte d’un amendement de Émilie Chalas (LREM), vise à ce que soit imposée, dans le PLU, une part minimale de surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables dans les espaces les plus denses, à savoir les zones d’urbanisation continue de plus de 50.000 habitants et les communes de plus de 15.000 habitants en forte croissance démographique. L’ambition est soit de protéger des espaces en pleine terre déjà existants, soit - c’est là "le petit bonus" qu’apporterait le projet de loi, selon elle - de désartificialiser des centres urbains qui sont beaucoup trop denses.
Renforcement de l’observation foncière (article 49 bis)
L’article 49 bis introduit en commission prévoit un délai de deux ans pour la mise en place d’observatoires de l’habitat et du foncier, après que le PLH a été rendu exécutoire. Le texte ajoute au titre de leur mission qu’ils rendent compte annuellement du nombre de logements construits sur des espaces déjà urbanisés et sur des zones ouvertes à l’urbanisation. Cet amendement de Jean-Luc Lagleize (Modem) prévoit que le bilan annuel du PLH qui fait l’objet d’une délibération de l’EPCI soit établi en s’appuyant sur les observatoires et comporte, pour chacune des communes, la comparaison entre les objectifs annualisés du PLH et les résultats de l’exercice écoulé.
Un amendement de Sandra Marsaud (LREM) prévoit que les agences d’urbanisme puissent apporter une ingénierie sur des territoires qui sont situés à proximité de leur périmètre d’action mais dépourvus de ce type de structure sur le long terme. Cela pourrait permettre de financer la réalisation d’études sur la reconquête de l’existant, ou l’optimisation de l’organisation de l’espace sur des communes ou des EPCI qui devront prochainement modifier ou réviser leurs documents de planification pour s’adapter à l’objectif de réduction de la consommation foncière et ainsi d’inscrire ces collectivités dans la perspective d’une ingénierie territoriale pérenne. Cet appui ponctuel, financé par une action de mécénat, est possible dans le cadre d’un contrat de projet partenarial d’aménagement ou d’une convention d’opération de revitalisation de territoire (ORT), clarifie un sous-amendement du gouvernement.
Les articles 49 ter (obligation de se doter de programmes locaux de l’habitat pour certaines intercos) et 49 quater (participation du président du Scot à la conférence territoriale de l’action publique) ont été adopté sans modification.
Conventions de sobriété foncière (article 49 quinquies)
Pour contribuer à l’objectif de sobriété foncière prévu aux articles 47 et 48 et précisé par leurs documents de planification et d’urbanisme, les collectivités en charge de l’urbanisme et de l’aménagement pourront également définir entre elles et avec l’État des contrats de sobriété foncière. Une dizaine d’amendements identiques (LREM, LR, Libertés et territoires) complètent et adaptent ces dispositions introduites en commission, en lien avec les associations des élus des territoires, notamment l’ADCF (Association des communautés de France), France urbaine et la Fnau (Fédération nationale des agences d’urbanisme) qui ont travaillé sur ce sujet. Quatre sous-amendements du rapporteur sont également à comptabiliser.
Par ces contrats rebaptisés "conventions de sobriété foncière", l’État et les collectivités organiseront l’ingénierie mobilisable, préciseront les besoins d’étude ou d’observatoire, identifieront les programmes pour parvenir aux objectifs de sobriété foncière. Les conventions pourront être également signée par le président de la région. Elles servent alors à accompagner la préparation et la mise en œuvre des orientations du Sraddet. Ces conventions permettent le cas échéant d’acter les trajectoires de sobriété foncière passées et celles inscrites dans le Scot et les PLU opposables. Elles "peuvent servir" de cadre de référence pour les collectivités et l’État lors de l’élaboration, la révision pour les Scot, PLU et cartes communales, sans que leur signature ne constitue une obligation pour les collectivités, souligne le sous-amendement du rapporteur.
Le préfet ne peut pas non plus être contraint par ces conventions dans l'avis qu'il délivre sur le document d’urbanisme. Surtout, "il ne pourra pas invoquer la signature d’une convention de sobriété foncière afin de repousser de deux ans les délais d’élaboration des documents d’urbanisme, délais que nous avons fixés de cinq à six ans", clarifie le sous-amendement. "Il n’est ainsi pas souhaitable de repousser davantage les délais de mise à jour des documents de planification", explique le rapporteur. La réalisation des contrats ne vient pas se substituer à la territorialisation des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols prévus à l’article 49, insiste-t-il. "Il s’agit d’un exercice complémentaire, pouvant être réalisé en amont, qui permet d’identifier le rythme actuel de l’artificialisation, les études et les projets prévus ainsi que les financements associés, qui contribueront à réduire le rythme d’artificialisation et sans préjudice de la trajectoire qui doit être fixée par les documents d’urbanisme"
Rapport du bloc local (article 50)
Un décret déterminera les conditions dans lesquelles l’État organise la mise à disposition aux communes (ou EPCI) des données qu'il est amené à collecter en destination de l'Observatoire de l'artificialisation mis en place dans le cadre du plan Biodiversité. En plus d'homogénéiser sur l'ensemble du territoire la méthode de production de la donnée et de faciliter ainsi les comparaisons territoriales, cette mise à disposition permettra aux communes de limiter le coût de production du rapport établissant l’état des lieux de l’artificialisation des sols observée sur l’année écoulée (ou tous les deux ans pour les communes de moins de 3.500 habitants) en exploitant directement de la donnée collectée et traitée par les services et agences de l’État, insistent les amendements identiques de Alain Perea (LREM) et Annie Chapelier (Agir ensemble).
Rapport décennal du gouvernement d’évaluation de la stratégie de lutte contre l’artificialisation (article 50 bis)
Le texte intègre dans la demande de rapport gouvernemental sur l’évaluation à horizon 2030 de la stratégie de lutte contre l’artificialisation les moyens alloués aux établissements publics fonciers (EPF) et aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) pour contribuer à la lutte contre l’artificialisation des sols, notamment par la renaturation des sols, au terme d’un amendement de Dominique Potier (Socialistes) sous-amendé par le rapporteur. Un amendement Agir ensemble ajoute en outre "l’imperméabilisation des sols" à l’objet du rapport.
Les articles 51 (insertion d’une densité minimale de construction dans les grandes opérations d’urbanisme) et 51 bis (création d’une étude préalable de densification pour les opérations d’aménagement faisant l’objet d’une évaluation environnementale) ont été adoptés sans modification.
Favoriser la densification dans les zones tendues (article 51 bis A nouveau)
L’article L. 152-6 du code l’urbanisme permet déjà à des constructions de déroger aux règles des PLU dans les zones tendues, sous certaines conditions. Cet amendement du rapporteur propose d’élargir le champ de cette dérogation selon plusieurs modalités pour produire du logement, notamment social, dans une logique de "densification raisonnée". Et notamment en étendant le périmètre d’application aux secteurs d’intervention comprenant un centre-ville des opérations de revitalisation territoriales (ORT) et aux grandes opérations d’urbanisme (GOU). Également en ajoutant de nouvelles dérogations, autrement dit des "bonus de constructibilité" que l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire peut refuser, par décision motivée, en tenant compte de la nature du projet, de la zone d’implantation ou des objectifs fixés par le PLU en matière de réduction du rythme de l’artificialisation des sols. "Nous prévoyons bien sûr un cadre strict : ne pourront entrer dans ce cadre que des enjeux de gabarit, avec des aires de stationnement, uniquement dans un but de mixité sociale ou lorsqu’il s’agit de transformer des bureaux en logements", indique le rapporteur. Enfin, une dérogation supplémentaire est introduite pour les "constructions contribuant à la qualité du cadre de vie par la création d’espaces extérieurs en continuité des habitations" (balcons, jardins…). Ce faisant, l’amendement inscrit dans le dur une partie de l’habilitation prévue à l’article 55. Dans un sous-amendement de clarification, le rapporteur général Jean-René Cazeneuve assure que la hauteur est égale à celle de l’immeuble contigu, et retire la notion d’intégration harmonieuse, "qui pouvait créer du stress chez les élus et ouvrir la voie à des contentieux".
Deux sous-amendements similaires (LR et Modem) ouvrent par ailleurs la possibilité de déroger à l’obligation de réaliser des aires de stationnement pour véhicules motorisés, en la réduisant, à due proportion, en contrepartie de la création d’une infrastructure ou d’un espace aménagé permettant le stationnement sécurisé de six vélos. "Il apparaît indispensable de ne pas additionner les besoins de stationnement des véhicules et des vélos qui conduisent à cumuler les obligations mais de mutualiser les surfaces", souligne l’exposé. Cette possibilité de déroger est là encore laissée à l’appréciation de l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire, qui pourra l’accorder ou la refuser, par décision motivée selon la nature du projet et sa zone d’implantation.
Interdiction de nouvelles surfaces commerciales artificialisantes (article 52)
L’Assemblée a adopté le principe général d’interdiction de création de nouvelles grandes surfaces commerciales qui engendreraient l’artificialisation des sols, assorti toutefois de dérogations au cas par cas pour les projets inférieurs à 10.000 m2 de surface de vente, jugées bien trop larges par de nombreux élus. Plusieurs députés, y compris dans la majorité, ont réclamé en vain un seuil à 5.000 m2 ou plus bas. "Le seuil de 10.000 m2 permet à 80% des projets d’échapper à toute réglementation", a relevé Loïc Prud'homme (LFI), qualifiant la mesure votée de "couteau sans lame auquel on aurait enlevé le manche". Au centre-droit, Thierry Benoît (UDI) a demandé "un moratoire de trois ans", une proposition soutenue par Jean-Paul Lecoq (GDR), Julien Aubert (LR) et le Socialiste Dominique Potier.
Finalement, les députés ont fait un pas de côté en votant des amendements du co-rapporteur Lionel Causse et de la députée Marie Lebec (LREM) précisant que toutes les demandes de dérogation pour des projets d’une surface de vente supérieure à 3.000 m2 soient examinées par la Commission nationale d’aménagement commercial (Cnac). Une structure nationale sera "de nature à être plus vigilante", a souligné la ministre Emmanuelle Wargon, y voyant "une garantie supplémentaire" pour que ces demandes de dérogations au dessus de 3.000 m2 soient examinées "avec toute la rigueur nécessaire".
On notera que le texte substitue à la notion "de proximité avec le tissu urbain existant" celle de "continuité avec les espaces urbanisés", qui fait partie des trois conditions obligatoires cumulatives encadrant les cas de l’octroi de la dérogation pour les surfaces de vente inférieure à 10.000 m2. "Cette notion, bien définie et cadrée, permet la prise en compte des caractéristiques physiques de l’environnement bâti, de l’environnement naturel, des infrastructures existantes, etc. Elle permet ainsi de répondre de manière pragmatique aux préoccupations de ne plus autoriser de zones commerciales excentrées, en extension urbaine et sans lien avec le tissu existant, sans pour autant fermer la possibilité d’implanter de nouveaux commerces en réponse aux besoins de la population", justifie le rapporteur dans son amendement.
Étude d’impact (article 52 bis A nouveau)
À l’initiative du rapporteur, le texte inclut une évaluation du projet sur l’artificialisation des sols dans le cadre de l’étude d’impact demandée dans la procédure d’évaluation environnementale.
Procédure ICPE (article 52 bis B nouveau)
Ce nouvel article ajoute "l’utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers" dans les intérêts protégés par la procédure ICPE dont l’autorisation est désormais intégrée dans l’autorisation environnementale
Réduire la construction de parking (nouvel article après l’article 52)
Dans les dix années suivant la promulgation de la loi, un nouvel article - adopté contre l’avis du gouvernement - fixe l’objectif de réduire de 50% l’emprise au sol des constructions de parking par rapport à la décennie précédente. Cet objectif s’accompagne dans la même période de celui d’installer des ombrières pour 50% des surfaces de parkings extérieurs existants. Et l’ensemble des parkings devront être végétalisés d’ici 2025.
Évolutions du document d’aménagement artisanal et commercial (article 52 bis)
L’article 52 bis renforce la capacité des collectivités territoriales à planifier le développement de l’implantation des entrepôts logistiques à vocation commerciale. A cette fin, il modifie le nom et le contenu du document d’aménagement artisanal et commercial (Daac) - partie composante obligatoire du document d’orientation et d’objectifs (DOO) du Scot - qui devient le document d’aménagement artisanal, commercial et logistique (Daacl). À la demande du Modem, le texte définit dans les nouveaux Daacl des secteurs d'implantation privilégiés au regard des besoins logistiques du territoire, et de la capacité des voiries existantes ou en projet à gérer les flux de marchandises et des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols.
Un sous-amendement du rapporteur supprime des paragraphes devenus redondants et insère des dispositions de coordination à l'article L. 151-6 du code de l’urbanisme qui porte sur les OAP du PLU.
L’article 53 (inventaire des zones d’activités économiques) n’a pas fait l’objet de modifications.
Subdivision de lots d’un lotissement (nouvel article après l’article 53)
La majorité simple des colotis suffira désormais dans le cas où le maire souhaite augmenter le nombre de lots autorisés au sein du lotissement pour procéder à une subdivision. La procédure actuelle (majorité qualifiée) conduit en effet à bloquer la plupart des initiatives de densification des zones pavillonnaires, souligne l’amendement LREM.
Définition des friches industrielles (article 53 bis)
L’article 53 bis inscrit dans le code de l’urbanisme - dans un nouvel article L111-26 - une définition officielle des friches. Mais pour que cette notion "soit pleinement effective et opérationnelle", il convient d’en préciser les contours et d’en déterminer les modalités d’application par décret. C’est l’objet d’amendements identiques LR et LREM. Le décret permettra notamment de s’intéresser aux aspects liés à l’absence d’usage du bien, sa désaffectation, et le cas échéant la durée de délaissement et d’abandon. Il pourra cibler la portée de cette définition en fonction des différents types de friches, afin de tenir compte prioritairement des friches constructibles et des surfaces déjà artificialisées, et exclure les terres agricoles en friche.
Étude de réversibilité (article 54)
Pour rappel, cet article impose au maître d’ouvrage de réaliser une étude de potentiel de changement d’usage lors de la conception d’un projet ou avant la démolition d’un bâtiment nécessitant un diagnostic déchets, afin de conforter la réversibilité et l’évolutivité des bâtiments. Pour la construction, le député Jean-Luc Lagleize (Modem) propose d’y inclure le potentiel de surélévation du bâtiment. Il avait d’ailleurs porté un amendement similaire en commission pour la démolition. Il est également prévu que la personne chargée de la réalisation de cette étude élabore un document attestant la réalisation de l’étude, qu’il transmet au maître d’ouvrage de la construction. Celui-ci doit à son tour le transmettre aux services de l’État compétents dans le département (au lieu du ministre), précise un autre amendement défendu par Martial Saddier (LR), et ce avant le dépôt de la demande de permis de construire. Un sous-amendement du rapporteur souligne que l'étude de réversibilité n'est pas une pièce à joindre au permis de construire.
Renvoi à ordonnance (article 55)
Une série d’amendements identiques LR et Socialistes suppriment de l’habilitation prévue par quatre alinéas distincts de l’article 55, les points déjà traités par le texte. C’est le cas pour trois d’entre eux, s’agissant de renforcer et rationaliser les conditions d’ouverture à l’urbanisation dans les règles d’urbanisme ; étendre les possibilités, notamment dans les secteurs tendus, de déroger au document d’urbanisme pour les projets qui font la démonstration de leur sobriété foncière ; et introduire des objectifs de sobriété foncière dans les programmes locaux de l’habitat et les plans de mobilité. Pour rappel, ces documents de planification doivent être directement compatibles avec les orientations du Scot qui intègrent déjà des objectifs de réduction de la consommation du foncier qui seront renforcés avec la présente loi.
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